La famille Lefebvre

Bonjour à tous,

Merci pour vos messages. Je n'ai malheureusement pas grand chose de plus à propos de la famille LEFEBVRE, si ce n'est l'état civil d'Anselme (1901-1987). Si j'ai bonne mémoire, c'est Olivier qui a effectué les recherches. Notre généalogiste Alain en sait peut-être davantage ?

Si elle est authentique, la bouteille à la mer a survécu, malgré sa fragilité, à tous les pièges que lui tendait l'océan, pendant des décennies, sans jamais se briser. #exploit
- le papier n'est pas gondolé, ni tâché, malgré les années passées dans l'eau mais, par contre, le message enroulé a pris soin de se déchirer en son milieu.
A mon humble avis, il s'agit d'une blague de mauvais goût.

En effet, pour une bouteille aussi ancienne, survivre à tous ces outrages pour être cassée par les enfants qui la récupèrent... Quelle ironie du sort ! Je regrette d'ailleurs que les photos de la bouteille soient d'une aussi mauvaise résolution : je n'arrive pas à me faire une idée de son ancienneté.

Quant au papier, c'est effectivement un truc qui me fait tiquer cette déchirure presque trop parfaite... Au moins, ça fait une jolie histoire...

Du nouveau concernant l'arrivée des différents membres de la famille aux USA :

- Les suppositions faites concernant Franck père se sont confirmées. Il a voyagé sous le nom d'Henri Dumortier en mars 1911 avec Anselme. Faisait également parti du voyage Martha Dupont et sa fille Léa, qui se sont fait passer pour épouse et fille de Franck. La raison donnée par les principaux intéressés étaient de permettre à Martha de fuir son mari. Cela reste à vérifier bien évidemment.

- Jules est bien entré aux États-Unis en décembre 1911 (deux semaines avant l'arrivée de sa sœur Marie) et a voyagé seul sur le paquebot Chicago. Je ne l'avais pas retrouvé lors de mes premières recherches car son nom était orthographié Lefebore. Comme il n'avait que 14 ans, il a été interné une semaine à Ellis Island et Franck a du faire une déclaration pour lui permettre de le rejoindre à Mystic (et travailler dans les mines, comme il le faisait déjà en France).

- À la suite du naufrage, les autorités américaines se sont intéressée d'un peu plus près au cas de Franck. Plusieurs quotidiens ont relayé son histoire, commençant par la mort de sa femme et de quatre enfants sur le Titanic, puis sur son entrée illégale dans le pays. Grâce à cela, j'ai eu la confirmation que Franck était bien venu avec Anselme et Jules puisque les deux garçons sont mentionnés dans la presse (Jules a également été arrêté).

- Anselme est décédé en 1970. Celui mentionné par notre Franck est un homonyme.

- Célina semble être la seule à ne pas avoir traversé l'Atlantique. Les recherches à son sujet restent pour le moment infructueuses.

Enfin, Antoine a pu participer a une visioconférence mercredi avec différentes personnes apparentées à la famille, qui pour certains ont effectué un gros travail de recherche (c'est grâce à leurs informations que j'ai retrouvé trace de Jules sur le manifeste du Chicago).
L'un d'eux a reçu une copie du procès de Franck, qu'il a partagé sur son site. C'est un gros dossier de 60 pages que nous n'avons que survolé avec Antoine, nul doute qu'il va nous apprendre encore des choses sur les Lefebvre.

C'est intéressant d'avoir ces infos !

Sur le lien que tu donnes, on trouve pas mal d'infos et de documents intéressants sur cette histoire de bouteille à la mer, notamment les recherches effectuées par la famille.
D'ailleurs, ces personnes apparentées à la famille ont-elles des contacts avec Jacques et Hélène Lefebvre, qu'on a pu voir dans les reportages consacrés à cette histoire ?

Joris

Parmi les documents, on retrouve également une photo de Franck âgé.

Joris a écrit:D'ailleurs, ces personnes apparentées à la famille ont-elles des contacts avec Jacques et Hélène Lefebvre, qu'on a pu voir dans les reportages consacrés à cette histoire ?

Effectivement ! C'est d'ailleurs sur l'initiative du propriétaire de ce site que s'est tenue la visioconférence cette semaine (Hélène et Jacques y ont participé). De ce que m'a dit Antoine (reprends moi si je me trompe) ils sont plusieurs descendants à être en contact : certains du côté de la famille de Marie Daumont et d'autres d'un frère de Franck Lefebvre.

Manny a écrit:Parmi les documents, on retrouve également une photo de Franck âgé.

Joris a écrit:D'ailleurs, ces personnes apparentées à la famille ont-elles des contacts avec Jacques et Hélène Lefebvre, qu'on a pu voir dans les reportages consacrés à cette histoire ?

Effectivement ! C'est d'ailleurs sur l'initiative du propriétaire de ce site que s'est tenue la visioconférence cette semaine (Hélène et Jacques y ont participé). De ce que m'a dit Antoine (reprends moi si je me trompe) ils sont plusieurs descendants  à être en contact : certains du côté de la famille de Marie Daumont et d'autres d'un frère de Franck Lefebvre.

C'est super, j'espère qu'on aura encore plus d'infos !
Tu sais s'ils étaient déjà en contact avant ou si c'est l'histoire de la bouteille qui les a rapprochés ?

Joris

Dans mes souvenirs, je dirais que c'est bien l'histoire de la bouteille qui a fait le lien entre toutes ces personnes. Sans certitude toutefois.

Quant aux informations, j'espère aussi qu'on en trouvera de nouvelles... ainsi que pour d'autres passagers/membres d'équipage.

Du nouveau pour la famille Lefebvre.

J'en ai appris un peu plus cette semaine sur le parcours de Célina, grâce au travail de recherches de plusieurs généalogistes qui ont retrouvé sa trace (mais toujours pas sa date de décès, même si des pistes plutôt solides sont suivies).

Nous pouvons être presque certains que c'est la seule membre de la famille à ne pas avoir traversé l'Atlantique. Elle s'est marié à Issy-les-Moulineaux, en banlieue parisienne, en juillet 1915. Son mari, Gaston Vandevelde, né dans la Somme, s'est retrouvé dans les mines de Liévin vers 1910, peut-être avant. C'est en tout cas ce qu'indique son matricule militaire. Il y rencontre Célina avec qui il a deux filles : Julienne, en 1911 (petit fille qui est déclarée à la mairie de Liévin par sa grand-mère, qui va disparaître dans le naufrage) et Andréa, née à Paris en 1914. On perds la trace de Célina après son mariage. On sait grâce à l'état civil qu'elle est décédée avant 1928 puisque Gaston Vandevelde se remarie cette année là, et il précise être veuf.

Je vous joins également un graphique que j'ai réalisé, qui est un récapitulatif des traversées des différents membres de la famille. J'y ai également inclue les expulsions de Frank et de ses deux fils (vous remarquerez qu'ils n'ont pas tous voyagé ensemble !), ainsi que les âges de tout ce petit monde... et on remarque que Frank et Marie étaient des parents relativement jeunes, ayant eu leur premier enfant à 18 et 17 ans.

On est donc au moins sûrs que Célina est restée en France.

Je suis surpris aussi de cette répartition des différents départs des membres de la famille entre mars 1911 et avril 1912. C'est uniquement pour des raisons financières qu'ils n'ont pas voyagé tous ensemble ? On peut le comprendre bien sûr.

Joris

Merci pour ces précieuses informations.
L'histoire tragique de cette famille est si touchante

Joris a écrit:Je suis surpris aussi de cette répartition des différents départs des membres de la famille entre mars 1911 et avril 1912. C'est uniquement pour des raisons financières qu'ils n'ont pas voyagé tous ensemble ? On peut le comprendre bien sûr.

Cela peut sembler surprenant au premier abord mais, en essayant de recontextualiser l'ensemble, on peut tenter de trouver des pistes de réponses. Il y a déjà des chances pour que Frank et Marie, les deux aînés de la fratrie, se soient payer leur billet (cela semble évident pour Marie). Les parents n'auraient eu donc "que" six enfants à prendre en charge. On peut ajouter à cela que Frank est parti avec ses deux fils restant les plus âgés, certainement parce qu'ils étaient en âge de travailler dans les mines, et donc d'aider financièrement à l'achat des billets qui permettra au reste de la famille de les rejoindre. Cela peut expliquer aussi pourquoi ce sont les enfants les plus jeunes (et en majorité des filles) qui ont voyagé sur le Titanic.

Je n'ai pas encore l'occasion de lire le procès de Frank, peut-être a-t-il expliqué lui-même les raisons de ces départs différés.

Je rebondis sur ce que vous disiez, Joris et Manon, pour confirmer que ce genre de départ séparé était très fréquent, en fait : souvent, certains partaient en éclaireurs (généralement des hommes, père, fils aîné...), puis revenaient au pays, ou faisaient venir leur famille... C'est le cas des Sage : John Sage était parti en éclaireur avec son fils aîné, avait repéré une propriété, ils sont revenus en Angleterre, et ont fait voyager la famille. Mais plus largement, vous n'aurez pas beaucoup de peine à trouver en troisième classe des gens rejoignant un frère, un père, etc.

Il faut ajouter à ça que, contrairement au mythe des immigrants laissant tout derrière eux pour trouver une nouvelle vie, les choses ne sont pas toujours si tranchées : on l'oublie souvent, mais beaucoup de migrants partis aux États-Unis sont finalement rentrés chez eux ensuite, soit qu'ils aient réussi à économiser assez pour avoir une bonne situation à la maison, soit qu'ils aient trouvé leur pays d'accueil bien peu accueillant. C'est un phénomène que l'historiographie américaine essaie d'oublier, car il n'est pas forcément glorieux pour le pays qui se targue d'avoir été l'El Dorado, mais un phénomène qui était relativement massif. Et au-delà de ça, il était aussi fréquent de faire des aller-retours, pour revoir la famille, ce genre de chose. Je crois que c'était le cas des Panula (à vérifier, cependant).

Je vois. La raison de ces départs échelonnés était donc rarement financière ?

Joris

Ah, elles pouvaient l'être, très certainement. Et je pense d'ailleurs que ces raisons expliquent aussi qu'on ait trouvé en 3e classe des gens qui n'étaient pas forcément des "pauvres gens". Un Frederick Goodwin, par exemple, aurait certainement pu voyager seul en 2e classe, je pense, vu son emploi d'ingénieur électricien, mais payer le voyage pour toute la famille s'annonçait bien plus compliqué. Car avec le nombre, forcément, le prix du billet monte en flèche. Je pense qu'il en va de même pour la famille Sage, par exemple.

Dans le cas des Lefebvre, c'est très net : voyagent en priorité ceux qui peuvent travailler, voir s'établir totalement dans leur coin, dans le cas de Franck et Marie jr.

Pour rebondir également sur mes propos, certaines interrogations que j'avais il y a plusieurs mois ont trouvé depuis leurs réponses (que vous pouvez lire dans l'article réalisé avec Antoine dans un des derniers numéros de L41)

Il est clair que dans le cas des Lefebvre, les départs ont été échelonnés pour raisons financières. Marie jr a voyagé avec son mari et ses deux enfants, on peut même dire qu'ils ont fait cavalier seul et qu'ils n'ont pas trop eu de contacts avec le reste de la famille (ce que confirme Franck lors de son procès).
Concernant Franck jr, Jules et Anselme, ils ont été choisis car ils pouvaient aidé financièrement à la venue du reste de la famille. C'est ce qui ressort du témoignage de Jules dans le procès. Lui et ses frères ne sont pas venus faire du tourisme. J'ai eu longtemps un doute concernant Anselme car il me paraissait bien trop jeune pour descendre dans les mines (en France, les différentes lois promulgués tout au long du XIXe siècle ont fixé l'âge minimum à 12 ans) mais c'était sans compter sur les États-Unis où la législation était plus "souple" (regardez les photos de Lewis Hine sur le sujet, c'est effrayant).

Nous savons aussi maintenant que Mary jr est retournée en Europe pour voir sa famille (le manifeste mentionne Liévin comme destination), et nous avons même une photo d'elle et de son mari lors du voyage (voir l'article de L41 cité précédemment !).

Antoine, est-ce qu'on a une idée du nombre de passagers survivants qui sont finalement rentrés chez eux après quelques années aux États-Unis ?