Arthur C. Clarke et le Titanic
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Arthur C. Clarke et le Titanic
Illuvivius a écrit:En découvrant la la couverture d'un vieux livre de poche intitulé Terre, Planète Impériale, au fin fond d'une vieille bibliothèque d'une maison de campagne, jamais je n'aurais cru que je puisse y entendre parler du Titanic. En effet il s'agit d'un roman paru en 1975, typiquement de Science-Fiction ( l'action se situe au XIIIe siècle ) et pourtant un chapitre entier est consacré au RMS Titanic. Finalement Arthur C Clarke n'a pas fini de m'étonner pour ces petits romans plein de poésie, bien qu'il y parle toujours du futur et de la science ...
Voilà le chapitre en question :Le fantôme du Grand-Banc
[...]
Rejoints à présent par d'autres qui faisaient visiblement partie du groupe Enigma, ils pénétrèrent dans un petit bâtiment adjacent qui ressemblait tellement à un sas étanche qu'il était facile d'imaginer qu'on allait dans l'espace. en fait, c'était bien une sorte de sas, qui contenait des rangées de vêtements de protection, blouses et pantalons en toile huilée, bottes de caoutchouc... et les casques qui avaient excité l'imagination de Bill van Hyatt. Dans un curieux silence d'attente avec seulement quelques sourires fugitifs devant l'aspect transformé de chacun d'entre eux, ils passèrent dans le sas intérieur.
Duncan s'était attendu à voir un bateau. En cela dumoins il ne fut pas surpris, mais complètement déconcerté par sa simple dimension : ce bateau emplissait presque la vaste construction qui l'entourait. Duncan savait que vers la fin, les pétroliers étaient devenus gigantesques, mais il n'avait aucune idée que les paquebots eussent jamais été aussi énormes. et il était évident d'après le nombre de ses hublots et de ses ponts que ce bateau avait été construit pour transporter des personnes, pas des marchandises.
La plate-forme d'observation sur laquelle les arrivants se trouvaient était au niveau du pont principal, juste en avant de la passerelle. Sur sa droite, Duncan pouvait voir un gros mât tronqué et un impressionnant ensemble de grues, de treuils, de manches à air et d'écoutilles. Sur la gauche s'étendait, vers la poupe invisible du bateau, un mur d'acier apparemment sans fin, ponctué de centaines de hublots. très haut, au dessus de tout cela, se dressaient trois formidables cheminées qui touchaient presque le plafond de l'enceinte. D'après leur emplacement, il était visible qu'une quatrième était manquante.
On voyait de nombreuses autres traces de dommages. Des vitres étaient brisées, des parties du pont avaient été arrachées et, en baissant le regard vers la quille, Duncan pouvait voire une énorme plaque de métal d'au moins cent mètres de long qui s'étendait juste au dessous de la ligne de flottaison.
Ce fut seulement alors que toutes les pièces du puzzle trouvèrent leur place. Ce jour-là, iln'était encore qu'un petit garçon sur une monde éloigné; mais il pouvait encore se souvenir quand, après son premier voyage de trois-cent cinquante ans, le Titanic avait enfin atteint New York.
"On n'en construisit jamais plus un pareil; il marqua la fin d'un ère, une ère de richesse et d'élégance qui fut balayée, deux ans plus tard seulement, par la premières des guerres mondiales. Oh! on en construisit de plus rapides et de plus gros dans le demi-siècle qui s'écoula avant que les transports aériens mettent fin pour toujours à ce chapitre! Mais aucun navire ne rivalisa avec le luxe que vous voyez à présent autour de vous. Trop de coeurs avaient été brisés lorsqu'il avait sombré."
Duncan le croyait volontiers; il était encore dans un rêve. Le magnifique salon d'honneur, avec ses immenses glaces, ses colonnes dorées et son tapis épais jusqu'à la cheville, était d'une opulence au delà de tout ce qu'il avait imaginé, et le sofa dans lequel il s'enfonçait lui faisait presque oublié la pesanteur terrestre. [note : le personnage a vécu sur une lune de Jupiter sur laquelle la gravité est plus faible] Pourtant, le plus incroyable de tout, c'était le fait que tout ce qu'il voyait et touchait avait reposé trois siècles au fond de l'Atlantique.
Il n'avait jamais réalisé que les profondeurs marines étaient presque aussi immuables que l'espace. " Tous les dégats, avait expliqué celui qui parlait, furent faits le premier matin. Quand le navire sombra deux heures et demie après que l'iceberg eut éventré la coque à tribord, il s'enfonca par la proue, presque verticalement. tout ce qui n'était pas fixé tomba vers l'avant jusqu'à ce que les cloisons étanches l'arrêtent ou soient enfoncées. Par une chance miraculeuse -et cela montre combien le navire avait été supérieurement construit - les trois machines restèrent en place; si elles avaient laché, la coque aurait été si gravement endommagée que nous n'aurions jamais pu le récupérer.
"Mais une fois qu'il atteignit le fond, trois kilomètres plus bas, il fut à l'abri pour des siècles. L'eau n'est là qu'à deux degré au-dessus du point de congélation, la combinaison du froid et de la pression empeche toute altération, interdit toute rouille, nous avons retrouvé de la viandes dans les frigorifiques aussi fraîches que lorsqu'elle avait quitté Southampton, le 10 avril 1912, et tout ce qui était en boîtes de conserve ou en bouteilles est toujours en parfaite condition.
"Nous l'avons donc réparé - un travail relativement simple, qoiqu'il fut un an pour boucher tous les trous et renforcer les parties faibles -, nous avons chassé l'eau à l'aide de fusées froide à poussée nulle que les spécialistes de la récupération dans les profondeurs marines ont mises au point. Naturellement, les conditions météorologiques étaient d'importance capitale; par chance, les prévisions furent idéales pour le 15 avril 2262, le navire émergea donc à la surface, exactement trois cent-cinquante après le jour même où il avait sombré. Les conditions météorologiques étaient identiques : calme plat, température glaciale. Et, vous ne le croirez pas, nous dûmes éviter un iceberg alors que nous commencions le remorquage!
"Nous l'amenâmes donc à new York, l'emplîmes d'azote pour empêcher la rouille et le sechâmes lentement. Pas de problèmes là-dedans - les archéologues sous-marins ont réussi la conservation de bateaux dix fois plus anciens que le Titanic. C'est le seul épisode de l'opérations qui nous a demandé quatorze ans et qui nous en demandera au moins dix de plus. des milliers de pièces d'ameublement brisées à trier, des centaines de tonnes de charbon à enlever, presque chaque morceau à la main.
"Parfois, on nous demande : pourquoi faites vous celà, dépensez vous des années de temps et des millions de solars pour sauver le passé? Eh bien, je peux vous donner quelques raisons terre à terre, pratiques. Ce navire fait partie de notre histoire; nous pourrons mieux nous comprendre, mieux comprendre notre civilisation en l'étudiant. Quelqu'un a dit qu'un bateau coulé était une capsule temporelle parce qu'il conserve tous les objets manufacturés de la vie quotidienne exactement tels qu'ils étaient au moment de leur dernier usage. Et le Titanic offrait le profil de toute une société au moment même ou elle allait commencer à se désagréger.
" Nous avons la cabine de luxe de John Jacob Astor avec tous les objets de valeur et les effets personnels que l'homme le plus riche de son époque emmenait à New York. Il aurait pu acheter le Titanic et même une douzaine de fois. Et nous avons la boîte à outils que Patrick o'Connor portait quand il embarqua à Queenstown, espérant trouver une vie meilleure dans un pays qu'il ne devait jamais voir. Nous avons même les cinq souverains qu'il avait réussi à économiser au bout de plus d'années de privations que ne pourrons jamais imaginer.
" Ce sont les deux extrèmes; entre eux, nous avons toutes les situations sociales - un inestimable trésor pour l'historien, l'économiste, l'artiste, l'ingénieur. Mais au delà, il règne une sorte de magie autour de ce navire dont le nom est resté dans les mémoires à travers les siècles. l'histoire du premier et dernier voyage du Titanic est uen histoire qui doit être racontée de nouveau à chaque génération afin que les hommes n'oublient pas les caprices du destin et du hasard.
[...]
Illuvivius-
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Localisation : Sur la proue du Titanic, regardant le navire sombrer dans l' eau noire et glaciale
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