Cuisine et gastronomie

De rien Véronique.
Ravi d'avoir pu t'aider, surtout que, lorsqu'il s'agit de cuisine, on peine m'arrêter.

Denis.

Merci à vous pour les informations.

Certains plats d'Auguste Escoffier ont l'air vraiment succulents

Joris

Il y avait trois cuisines à bord pour les passagers :
Pont B : cuisines du Restaurant à la Carte.
Pont D : cuisines des premières et secondes classes.
Pont F : cuisines des troisièmes classes.

A bord il y avait bon nombre de passagers de confession juive :
En première classe : les Straus ; Jakob Birnbaum ; les Meyer (non, pas moi) ; les Frauenthal... (Pauvre Astor archi xénophobe, il était envahi).
Dans les autres classes aussi, mais je n'ai pas cherché.

Et à bord, il y  avait Charles Kennel, cuisinier Casher.

Maintenant vient la question : mais comment faisait-il pour pouvoir contenter ses passagers israélites si certains d'entre eux se trouvaient en même temps dans les quatre salles à manger (1 ère, 2 ème, 3 ème classe + Restaurant  à la Carte) ?
Par exemple : les Frauenthal dans la salle à manger du pont D et les Straus au Restaurant à la Carte + ceux des deux autres classes inférieures dans leurs salles à manger respectives.

Je suppose que pour la Troisième Classe, la White Star Line s'en cognait profondément des repas casher qu'auraient pu désirer certains passagers.
Par contre, en Première (et aussi en Deuxième quand même, je suppose), il y avait des passagers riches qui payaient comptant : il ne fallait donc pas les mécontenter. Je suppose que le cuisinier casher, que je connaissais quant à son existence, devait slalomer entre les les cuisines communes de Première/Deuxième Classes et celles du Restaurant à la Carte.

J'étais persuadé que le cuisinier kascher officiait au Restaurant à la carte, auquel cas la question aurait été simple... Je pense malgré tout que Kennel devait être limité à la première et deuxième classe qui partageaient une cuisine commune : les passagers concernés ne devaient de toute façon pas être nombreux : où bien il s'agissait de migrants (qui voyageaient souvent en gros groupes : la quasi totalité des passagers du Mount Temple étaient juifs, au point qu'on y faisait shabbat) mais ils devaient plutôt partir des ports allemands et belges, venant d'Europe centrale ; soit il s'agissait de la clientèle fortunée américaine, comme les Straus. Je pense que c'est à ce genre de passagers que le cuisinier était destiné.

Quant au Restaurant à la carte... je ne vois pas Kennel y travailler. Le personnel avait un statut différent, donc outre les déplacements, ça aurait été difficile à gérer. Mais je pense que l'équipe de Gatti était de toute façon assez au fait de tout ça pour s'adapter.

Après, le Titanic était assez à la ramasse sur ce point par rapport aux paquebots français qui avaient parfois une cuisine spéciale, une équipe spéciale et de la vaisselle réservée. De façon générale, de toute façon, les paquebots français semblent s'être beaucoup plus intéressés aux services religieux, là aussi en premier lieu pour attirer les passagers aisés.

LittleTony87 a écrit:
Quant au Restaurant à la carte... je ne vois pas Kennel y travailler. Le personnel avait un statut différent, donc outre les déplacements, ça aurait été difficile à gérer. Mais je pense que l'équipe de Gatti était de toute façon assez au fait de tout ça pour s'adapter.

Vu que la cuisine casher est extrêmement complexe à mettre en place, surtout à bord d'un paquebot (ustensiles "spéciaux", plans de travail en cuisine exclusivement dédié à la manipulation de la viande casher, vaisselle spéciale casher...) me trompe-je en disant que la WSL se moquait un peu de ses passagers israélites et qu'elle n'indiquait la présence d'un cuisinier casher que pour les "rassurer", alors qu'il n'en était peut-être rien et que leur nourriture était la même que celle des autres passagers ?

Denis a écrit:

LittleTony87 a écrit:
Quant au Restaurant à la carte... je ne vois pas Kennel y travailler. Le personnel avait un statut différent, donc outre les déplacements, ça aurait été difficile à gérer. Mais je pense que l'équipe de Gatti était de toute façon assez au fait de tout ça pour s'adapter.

Vu que la cuisine casher est extrêmement complexe à mettre en place, surtout à bord d'un paquebot (ustensiles "spéciaux", plans de travail en cuisine exclusivement dédié à la manipulation de la viande casher, vaisselle spéciale casher...) me trompe-je en disant que la WSL se moquait un peu de ses passagers israélites et qu'elle n'indiquait la présence d'un cuisinier casher que pour les "rassurer", alors qu'il n'en était peut-être rien et que leur nourriture était la même que celle des autres passagers ?

Ce n'est pas improbable, en effet. Kennel était peut-être chargé de préparer des plats vraiment typiques, à l'occasion, pour faire illusion. Ça me rappelle un ami de mes parents, patron de bar dans notre petit village quand j'étais gamin. Ma grand-mère était la seule personne de sa clientèle à lui commander des décas. Ils nous a avoué vingt ans plus tard qu'il se contentait de servir un café normal en déplaçant la position de la cuillère pour faire semblant d'avoir pris ça en considération... Et ma grand mère n'a jamais rien remarqué.

LittleTony87 a écrit:

Denis a écrit:

LittleTony87 a écrit:
Quant au Restaurant à la carte... je ne vois pas Kennel y travailler. Le personnel avait un statut différent, donc outre les déplacements, ça aurait été difficile à gérer. Mais je pense que l'équipe de Gatti était de toute façon assez au fait de tout ça pour s'adapter.

Vu que la cuisine casher est extrêmement complexe à mettre en place, surtout à bord d'un paquebot (ustensiles "spéciaux", plans de travail en cuisine exclusivement dédié à la manipulation de la viande casher, vaisselle spéciale casher...) me trompe-je en disant que la WSL se moquait un peu de ses passagers israélites et qu'elle n'indiquait la présence d'un cuisinier casher que pour les "rassurer", alors qu'il n'en était peut-être rien et que leur nourriture était la même que celle des autres passagers ?

Ce n'est pas improbable, en effet. Kennel était peut-être chargé de préparer des plats vraiment typiques, à l'occasion, pour faire illusion. Ça me rappelle un ami de mes parents, patron de bar dans notre petit village quand j'étais gamin. Ma grand-mère était la seule personne de sa clientèle à lui commander des décas. Ils nous a avoué vingt ans plus tard qu'il se contentait de servir un café normal en déplaçant la position de la cuillère pour faire semblant d'avoir pris ça en considération... Et ma grand mère n'a jamais rien remarqué.

N'est-ce pas dangereux? Si un passager s'en était aperçu, la White Star Line aurait eu gros à perdre!

Canard-jaune a écrit:

LittleTony87 a écrit:

Denis a écrit:

LittleTony87 a écrit:
Quant au Restaurant à la carte... je ne vois pas Kennel y travailler. Le personnel avait un statut différent, donc outre les déplacements, ça aurait été difficile à gérer. Mais je pense que l'équipe de Gatti était de toute façon assez au fait de tout ça pour s'adapter.

Vu que la cuisine casher est extrêmement complexe à mettre en place, surtout à bord d'un paquebot (ustensiles "spéciaux", plans de travail en cuisine exclusivement dédié à la manipulation de la viande casher, vaisselle spéciale casher...) me trompe-je en disant que la WSL se moquait un peu de ses passagers israélites et qu'elle n'indiquait la présence d'un cuisinier casher que pour les "rassurer", alors qu'il n'en était peut-être rien et que leur nourriture était la même que celle des autres passagers ?

Ce n'est pas improbable, en effet. Kennel était peut-être chargé de préparer des plats vraiment typiques, à l'occasion, pour faire illusion. Ça me rappelle un ami de mes parents, patron de bar dans notre petit village quand j'étais gamin. Ma grand-mère était la seule personne de sa clientèle à lui commander des décas. Ils nous a avoué vingt ans plus tard qu'il se contentait de servir un café normal en déplaçant la position de la cuillère pour faire semblant d'avoir pris ça en considération... Et ma grand mère n'a jamais rien remarqué.

N'est-ce pas dangereux? Si un passager s'en était aperçu, la White Star Line aurait eu gros à perdre!

Comment s'en serait-il aperçu ? Il aurait fallu qu'il s'infiltre dans les cuisines, probablement... et là, c'est certainement lui qui aurait eu des soucis. Au pire du pire, on aurait fait passer ça pour une erreur... Et remboursé rapidement les repas/la traversée...

Je pense que vu le prix que coutait le billet, les passagers faisaient une confiance presque aveugle en la White Star Line niveau... tout (service, nourriture, sécurité... naufrage).

Et une fois dans l'assiette, que leur agneau était casher ou non, c'était totalement indétectable. A contrario d'un végétarien qui se serait retrouvé avec une boulette de viande dans sa jardinière de légumes.

Reste qu'ils auraient très bien pu demander à visiter la cuisine. Mais ça n'a dû traverser l'esprit de personne, comme ça ne traverse aujourd'hui la tête de personne de demander la visite des cuisines du restaurant où il ou elle a mangé, même si c'est possible sous certaines conditions.
Et quand bien même une jolie formule de politesse du genre : "voyez-vous Mr, vous risqueriez de vous salir en visitant les cuisines..." aurait suffit.

Denis a écrit:Et quand bien même une jolie formule de politesse du genre : "voyez-vous Mr, vous risqueriez de vous salir en visitant les cuisines..." aurait suffit.

Voire le classique "Mais enfin, ne vous dérangez pas ! Notre cuisinier va se déplacer lui-même pour vous parler !"

Je ne laisse pas tomber la cuisine casher servie à bord.
Dans son livre "les amoureux du Titanic, 13 histoires vraies", Gill Paul parle brièvement des passagers israélites dans le chapitre consacré aux Frauenthal.
Elle y indique que : "les espaces de la cuisine et du garde-manger sont organisés de manière à permettre la préparation de repas selon les règles de la religion israélite". A bord se tiendrait aussi des prières du samedi.

Vu qu'elle je cite pas ses sources, je me suis retourné vers l'ami Bruce (Beveridge, pas Ismay).
Dans son inventaire des ustensiles de cuisine il indique : "a wooden kosher box" (Box c'est assez vague comme terme à traduire : une boite de bois casher ? Un garde-manger casher fait en bois ? Ou est-ce un placard avec tous les ustensiles réservés à la cuisine casher ? ).

Concernant la troisième classe, il parle d'un "service de table spécial casher" car il était accordé beaucoup d'importance à la clientèle émigrante juive qui était fortement représentée dans cette classe. La vaisselle casher était de la marque "Stonier", en faïence blanche avec un motif noir sur le pourtour, surmonté du logo de la WSL. Les pièces étaient annotés en hébreux et en anglais selon à quoi elles étaient destinées.
Si cela avait court en troisième classe, ce devait être le même système en seconde et en première, pour peu qu'on dise à l'embarquement qu'on était juif.

Plus loin, concernant la nourriture Beveridge indique que l'on respectait à bord le fait que des passagers puissent avoir un régime particulier (notamment à cause de leur appartenance religieuse) et donc que la compagnie se pliait à leur proposer une nourriture particulière dans ses chambres froides, ainsi qu'un mode de préparation en respect avec leur croyance.

Et enfin, Bruce Beveridge indique un petit escalier en colimaçon qui partait des cuisines du pont D et qui montait jusqu'à celles du Restaurant à la Carte, et même jusqu'au fumoir. Ce qui pourrait laisser éventuellement l'accès au cuisinier casher s'il s'était trouvé des passagers israélites prenant un repas au "Ritz" (Là encore devaient-ils se signaler,  qu'ils étaient juif, car ça n'était pas écrit sur leur front).

Ah bah voilà, je me disais bien qu'ils étaient pros, sur le Titanic, quand même!

Canard-jaune a écrit:Ah bah voilà, je me disais bien qu'ils étaient pros, sur le Titanic, quand même!

"Merci Thomas Andrews pour la wooden kosher box" dis-je sans aucun parti pris.