La Bonté.
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La Bonté.
J’écoutais en plein orage du mois de novembre, cette musique ténébreuse et je me suis souvenu de La Bonté …
… ce charbonnier 3 mâts barque baptisé BETHIA, construit en 1784 aux chantiers navals de Hull en Angleterre et qui fut acheté par la Royal Navy Britannique pour une somme de 2,600 £ le 26 mai 1787. Renommé HMS BOUNTY (HMS BONTÉ) et regréé en frégate, il est entrée dans l'histoire en raison de la mutinerie d'une partie de son équipage le 28 avril 1789.
Original : bois
Hull, Angleterre 1784
Longueur : 91’ / Largeur: 24’
215 tonneaux
Équipage : 46 hommes
1ière réplique : bois
Smith & Rhuland Shipyard, Lunenburg, Nova Scotia, Canada 1960
Longueur: 108’ / Largeur: 31.5’
266 tonneaux
Équipage : 16 hommes
2ième réplique : acier / bois
Oceania Marine, Whangarei, New Zealand 1978
Longueur : 98’ / Largeur: 23’
274 tonneaux
Les colonies britanniques ont peine à trouver de nouvelles sources d'approvisionnement pour nourrir leurs esclaves. Le naturaliste Joseph Banks se souvient d'avoir observé, lors de son voyage avec le capitaine Cook à bord de l’Endeavour, que les Tahitiens se nourrissaient de fruits de l'arbre à pain. Ces derniers une fois cuits, présentent une chair blanchâtre semblable à de la mie de pain.
La Royal Society soumet au roi George III, le projet d’introduire et d’acclimater l'arbre à pain aux Antilles, qui accueille ce plan avec enthousiasme. L'Amirauté rachète un charbonnier sous le nom de Bethia le 26 mai 1787, on le rebaptise le Bounty. On l’arme d’un équipage de 46 hommes et de quatre canons de quatre livres et dix pierriers d'une demi-livre et on nomme le lieutenant William Bligh à titre de commandant. Ce dernier doit cette recommandation à ses qualités d'excellent marin, dû au fait qu'il a navigué avec James Cook comme maître d'équipage sur le HMS Resolution.
Le navire appareille le 23 décembre 1787. Le début de la traversée est marqué par une tempête où éclate le premier conflit entre le capitaine Bligh et son équipage à suite de la disparition de fromages. Afin d'économiser la nourriture, Bligh décide de remplacer les deux livres quotidiennes de pain par une livre de citrouilles achetées à Ténériffe. La répugnance de l'équipage vis-à-vis ces citrouilles avariées provoque un nouvel accès de colère de Bligh.
En avril, le Bounty se présente au cap Horn. Pendant un mois entier au milieu de la tempête, le Bounty essaie de franchir le Cap Horn. Les pompes sont mises en action toutes les heures. Bligh renonce finalement et décide de rallier Tahiti en passant par le cap de Bonne-Espérance. Le 23 mai 1788, le Bounty double le Cap de Bonne-Espérance. Le 20 août le Bounty aborde les côtes de Tasmanie. Le 26 octobre 1788 après dix mois de traversée, le Bounty touche enfin la pointe Vénus au nord de Tahiti après un passage de 10 mois en mer sur 27,000 milles nautiques.
La traversée ayant été plus longue que prévue, le Bounty arrive à la mauvaise saison et Bligh est contraint de prolonger son séjour sur l'île. La récolte des arbres à pain va durer six mois et seront conservés dans l'entrepont du Bounty. Quelque temps plus tard, la décision de Bligh de s'approprier tous les porcs que l'équipage a ramenés à bord provoque de nouveaux incidents. En janvier 1789, le capitaine d'armes et deux matelots désertent dans le canot du bord en emportant des armes, des munitions et des provisions. Pourchassés, ils se rendent le 22 janvier. Malgré leur repentir, le capitaine Bligh les condamne à 24 coups de fouet (le chat à neuf queues) pour le capitaine d'armes et 48 coups pour les matelots. Cette punition est très mal acceptée par l'équipage. Les officiers subissent également les réprimandes de Bligh. L'accès de colère de Bligh suivant, est déclenché lorsqu'il découvre que des voiles ont moisi dans la soute, inondée par les pluies car elle n'était pas étanche. Bligh accuse l'équipage de négligence vis-à-vis de l'entretien des voiles. Les hommes sont démoralisés par toutes ces injustices.
Le Bounty quitte Tahiti le 5 avril 1789. Le 28 avril, Fletcher Christian déclenche la fameuse mutinerie. Onze des 42 membres d'équipage suivent la mutinerie et 31 restent fidèles au capitaine Bligh qui embarquent à bord d'un canot avec 18 hommes. Les autres doivent rester à bord pour aider à la manœuvre. Le capitaine Bligh réussit l'exploit d'emmener ce canot de 23 pieds surpeuplé jusqu'à Timor, soit un périple de 3,600 milles marins en 41 jours, avec quelques escales dans les îles inhospitalières du Pacifique.
Les mutins quant à eux, se dirigent vers l'île de Tubuai où ils essaient de s'y installer. Trois mois plus tard, ils retournent à Tahiti pour y déposer 16 membres d'équipage, dont l'officier Peter Heywood. Fletcher Christian, huit hommes d'équipage, six Tahitiens et onze femmes, dont une avec un bébé, s'embarquent à bord du Bounty en espérant d’échapper à la Royal Navy. Ils débarquent sur l'île Pitcairn, choisie car elle est mal positionnée sur les cartes maritimes de l'époque et incendie le navire le 23 janvier 1790. Cette date du 23 janvier est célébrée chaque année dans l'île Pitcairn. Les mutins finissent par massacrer les Tahitiens mâles puis, l'un d'eux ayant fabriqué un alambic de fortune, se mettent à l'alcool et commencent à s'entretuer. Le sort des mutins, recherchés par la Royal Navy, reste inconnu jusqu'à ce qu'un baleinier, le Topaz, s’arrête sur l'île pour prendre de l'eau en septembre 1808. Un seul mutin, John Adams, est encore en vie. Il vit avec dix femmes et leurs enfants.
Les mutins restés à Tahiti offrent quant à eux, leurs services de mercenaires et fournissent des armes au clan du chef Tu, participant ainsi à la création de la dynastie Pomare. En 1791, 14 des présumés mutins sont capturés par l’équipage du HMS Pandora ordonné par l’Amirauté d’aller les chercher. Revenant par l'ouest et le détroit de Torrès, la frégate s'échoua le 29 août 1791 sur la Grande Barrière de Corail. Elle coula le lendemain matin, coûtant la vie à 31 membres d'équipage et 4 des prisonniers enfermés et enchaînés. Le reste des 89 membres d'équipage et 10 prisonniers, dont 7 d'entre eux étaient hors de leur cellule lorsque le navire fit naufrage, débarquèrent sur un petit banc de sable. Après deux nuits sur l'îlot sablonneux, ils partirent à la rame vers le Timor dans 4 canots. Ils arrivèrent à Kupang le 16 septembre 1791 après une pénible traversée de la mer d'Arafura. Seize marins survivant du naufrage sont morts durant l’odyssée et de nombreux tombèrent malades au cours de leur séjour à Batavia, Jakarta. Finalement, seulement 78 des 134 hommes qui étaient embarqués à Portsmouth rentrèrent chez eux. Les survivants du naufrage et du périple en mer devront encore survivre au retour qui se fait dans des conditions lamentables.
Le procès en Grande-Bretagne est retentissant. Bligh rentré le premier, a déjà publié sa version des faits. Bien que sa sévérité soit connue dans la Navy et jugée tyrannique, l'opinion publique lui était largement favorable. Les témoignages s'accumulent, plus ou moins confus en ce qui concerne le rôle précis de chacun lors de la mutinerie. Certains échappent à la potence grâce à la clémence du roi.
Deux répliques du Bounty ont été construites pour les besoins du cinéma. La première réplique lancée en 1960 en Nouvelle-Écosse au Canada, pour le tournage du film Les Révoltés du Bounty avec Marlon Brando, a été redimensionnée pour laisser circuler les caméras librement sous les barrots de pont. Le scénario du film destinait la réplique du Bounty à être brulée à la fin du film mais Brando, l’enfant terrible du cinéma, s’y opposa fermement en menaçant de quitter le plateau de tournage, alors que le film était en voie d’être terminé. La MGM Studios n’a eu d’autres choix que de rebâtir une maquette-décors pour les besoins de cette mise à feu de manière à conserver le Bounty.
Le navire a par la suite fait de nombreuses apparitions promotionnelles, joué dans d’autres films dont Le Secret du Coffre Maudit, des séries télévisées et documentaires historiques. En 1965, le navire arriva à St. Petersburg en Floride, où il y demeura pendant les 21 années suivantes à titre d’attraction touristique à quai. En 1978, une seconde réplique à coque d’acier recouverte de bois a été construite en Nouvelle-Zélande, pour le film Le Bounty avec Mel Gibson et Anthony Hopkins et est utilisée depuis à des fins de loisirs à Discovery Bay, Hong Kong. En 1986, Ted Turner acquerra le Bounty.
En 1989, le superpétrolier Exxon Valdez au commande de Joseph Hazelwood s’échoue sur Bligh Reef, un écueil nommé en l’honneur du commandant William Bligh du Bounty et déverse 200 millions de litres de pétrole brut dans les eaux cristallines du Prince William Sound.
En 1993, Turner Broadcasting abandonne le Bounty au profit de la ville de Fall River dans le Massachusetts où il pourri humilié dans un état de déprédation. En 2001, Robert Hansen de la HMS Bounty Organization fait l’acquisition du Bounty pour une somme symbolique. L’objectif est de le restaurer pour qu’il puisse naviguer en tant que navire de plaisance et d’offrir à titre non-lucratif des classes en mer. Le navire a de plus une vocation commerciale détenant un certificat émis par la USCG d’attraction touristique à quai seulement. Après plusieurs radoubs de chantier naval, d’apparitions dans des foires nautiques et une transatlantique, on fait la demande d’un certificat pour le transport lucratif de passagers à l’American Bureau of Shipping. Pour se conformer aux exigences règlementaires, on devra effectuer un chantier majeur qui sera évalué hors de la portée financière de l’Organisation du Bounty. La décision est alors prise de mettre en vente le 3 mâts barque, tout en poursuivant son programme.
À la suite d’un chantier d’un mois à Boothbay Harbor, Maine, visant principalement à déplacer les quartiers de l’équipage et des réservoirs à eau vers l’avant, à installer de nouvelles soutes à combustible, à construire un nouvel accès entre l’entrepont et celui exposé et en terminant ces travaux, par déplacer vers l’arrière du ballast de plomb pour obtenir une assiette positive. Ainsi, on a modifié le centre de gravité sans consulter, sans connaître les impacts sur la stabilité, sans autorisation et donc, sans amender le livret de stabilité émis par la USCG qui certifie l’état de navigabilité et ce, même après avoir été avisé de cette bévue par un architecte naval via Facebook. Finalement, on a profité de l’occasion pour calfater les joints et abouts à l’étoupe et de sceller le tout avec du DAP 33 Kitchen and Bath ou NP1 et remplacer quelques vergues. Au moment du naufrage, la quille, la carlingue, des barrots et des membrures des œuvres vices étaient des années de la construction en 1960.
Le 25 octobre 2012, le Bounty sous le commandement de Robin Walbridge avec un équipage total de 17 membres, appareille de New London Connecticut pour St. Petersburg en Floride. Au même moment, le cyclone tropical Sandy après avoir balayé les Bahamas fait son atterrage sur Cuba avant de bifurquer vers le nord. Des modèles météorologiques français prévoient que Sandy altérera sa course en direction de la côte nord-est des États-Unis. L’ouragan Sandy sera ultérieurement déclaré comme étant le deuxième cyclone le plus dévastateur ayant touché la côte nord-est des États-Unis et aura provoqué la mort de 285 personnes et des dommages estimés à plus de $71 milliards de dollars. Le Bounty navigue alors en direction du sud par l’est de manière à garder en retrait l’ouragan et d’analyser sa trajectoire future, qui est estimée d’atterrir entre l’état de New York et celui du New Jersey. Le matin du 27 octobre le commandant change le cap du sud par l’est pour un nouveau cap vers le sud-ouest, en croyant profiter des vents portant cyclonaux nord-est.
Les conditions océaniques se détériorent sous des vagues de plus de 30 pieds, soulevées par des vents de 90 nœuds à contre le perfide Gulf Stream, s'écoulant entre le Cap Hatteras et l’œil de l’ouragan. Le navire roule, tangue, plonge et les efforts délient sournoisement la frêle structure et l’eau de mer envahie la cale et court-circuite les équipements. Les pompes ne suffisent plus. L’équipage est exténué, blessé et malade de mer. Les équipements mécaniques et électriques tombent en panne en cascade. On rapporte la condition du Bounty à la USGC mais croyant que le navire demeurerait à flot même avec 10 pieds d’eau dans la cale et un envahissement de 2 pieds à l’heure, on n’espère pas un sauvetage immédiat.
Le 29 octobre à 0334, le Hercule Longue Portée CG-2004 du Centre de Commande de la USCG du Secteur Nord de la Caroline dépêché sur les lieux du naufrage déclare que les conditions météorologiques empêchent les hélicoptères H-60 de procéder au sauvetage et sous ses recommandations, avise que le commandant abandonnera le Bounty à 0800. À 0341, le Capitaine Walbridge transmet un e-mail à la SEC.NC CC disant;
“We have lost all dewatering abilities. Estimate 6 – 10 hours left. When lose all power we will lose email. There should be an EPRB going off. Water is taking on fast. We are in distress. Ship is fine we can’t dewater. Need pumps.”
À 0426 le lundi 29 octobre 2012, les surfaces libres de l’eau de mer envahissante anéantissent la stabilité, le navire se couche sur son flanc, l’étrave immergée, le sort du Bounty en est jeté. L’équipage se retrouve à la mer dans le chao avant même d’avoir évacué. À 0640, un hélicoptère de la USCG arrive sur les lieux et on débute les opérations de hissage de l’équipage naufragé.
Lors du naufrage, on déplorera la mort de Claudene M. Christian âgée de 42 ans qui se trouvait une descendante du maître-voilier Fletcher Christian, à qui on attribue d’avoir pris à la tête de la célèbre mutinerie. Quant à la disparition du Capitaine Walbridge, il aura probablement élu de sombrer avec son navire.
Les enquêteurs de la Garde Côtière des États-Unis constatent des évidences substantielles que l’organisation HMS Bounty, le capitaine et un maître, ont au travers leurs actions et inactions commis des actes de négligence, qui ont contribués aux facteurs et aux causes de la perte de vies humaines consécutive au naufrage.
La saga du Bounty n’est pas terminée puisque la famille de Claudene M. Christian poursuit en justice Robert Hansen, l’armateur propriétaire et CEO de la HMS Bounty Organization pour la somme de $90 millions de dollars.
Haddock.
… ce charbonnier 3 mâts barque baptisé BETHIA, construit en 1784 aux chantiers navals de Hull en Angleterre et qui fut acheté par la Royal Navy Britannique pour une somme de 2,600 £ le 26 mai 1787. Renommé HMS BOUNTY (HMS BONTÉ) et regréé en frégate, il est entrée dans l'histoire en raison de la mutinerie d'une partie de son équipage le 28 avril 1789.
Original : bois
Hull, Angleterre 1784
Longueur : 91’ / Largeur: 24’
215 tonneaux
Équipage : 46 hommes
1ière réplique : bois
Smith & Rhuland Shipyard, Lunenburg, Nova Scotia, Canada 1960
Longueur: 108’ / Largeur: 31.5’
266 tonneaux
Équipage : 16 hommes
2ième réplique : acier / bois
Oceania Marine, Whangarei, New Zealand 1978
Longueur : 98’ / Largeur: 23’
274 tonneaux
Les colonies britanniques ont peine à trouver de nouvelles sources d'approvisionnement pour nourrir leurs esclaves. Le naturaliste Joseph Banks se souvient d'avoir observé, lors de son voyage avec le capitaine Cook à bord de l’Endeavour, que les Tahitiens se nourrissaient de fruits de l'arbre à pain. Ces derniers une fois cuits, présentent une chair blanchâtre semblable à de la mie de pain.
La Royal Society soumet au roi George III, le projet d’introduire et d’acclimater l'arbre à pain aux Antilles, qui accueille ce plan avec enthousiasme. L'Amirauté rachète un charbonnier sous le nom de Bethia le 26 mai 1787, on le rebaptise le Bounty. On l’arme d’un équipage de 46 hommes et de quatre canons de quatre livres et dix pierriers d'une demi-livre et on nomme le lieutenant William Bligh à titre de commandant. Ce dernier doit cette recommandation à ses qualités d'excellent marin, dû au fait qu'il a navigué avec James Cook comme maître d'équipage sur le HMS Resolution.
Le navire appareille le 23 décembre 1787. Le début de la traversée est marqué par une tempête où éclate le premier conflit entre le capitaine Bligh et son équipage à suite de la disparition de fromages. Afin d'économiser la nourriture, Bligh décide de remplacer les deux livres quotidiennes de pain par une livre de citrouilles achetées à Ténériffe. La répugnance de l'équipage vis-à-vis ces citrouilles avariées provoque un nouvel accès de colère de Bligh.
En avril, le Bounty se présente au cap Horn. Pendant un mois entier au milieu de la tempête, le Bounty essaie de franchir le Cap Horn. Les pompes sont mises en action toutes les heures. Bligh renonce finalement et décide de rallier Tahiti en passant par le cap de Bonne-Espérance. Le 23 mai 1788, le Bounty double le Cap de Bonne-Espérance. Le 20 août le Bounty aborde les côtes de Tasmanie. Le 26 octobre 1788 après dix mois de traversée, le Bounty touche enfin la pointe Vénus au nord de Tahiti après un passage de 10 mois en mer sur 27,000 milles nautiques.
La traversée ayant été plus longue que prévue, le Bounty arrive à la mauvaise saison et Bligh est contraint de prolonger son séjour sur l'île. La récolte des arbres à pain va durer six mois et seront conservés dans l'entrepont du Bounty. Quelque temps plus tard, la décision de Bligh de s'approprier tous les porcs que l'équipage a ramenés à bord provoque de nouveaux incidents. En janvier 1789, le capitaine d'armes et deux matelots désertent dans le canot du bord en emportant des armes, des munitions et des provisions. Pourchassés, ils se rendent le 22 janvier. Malgré leur repentir, le capitaine Bligh les condamne à 24 coups de fouet (le chat à neuf queues) pour le capitaine d'armes et 48 coups pour les matelots. Cette punition est très mal acceptée par l'équipage. Les officiers subissent également les réprimandes de Bligh. L'accès de colère de Bligh suivant, est déclenché lorsqu'il découvre que des voiles ont moisi dans la soute, inondée par les pluies car elle n'était pas étanche. Bligh accuse l'équipage de négligence vis-à-vis de l'entretien des voiles. Les hommes sont démoralisés par toutes ces injustices.
Le Bounty quitte Tahiti le 5 avril 1789. Le 28 avril, Fletcher Christian déclenche la fameuse mutinerie. Onze des 42 membres d'équipage suivent la mutinerie et 31 restent fidèles au capitaine Bligh qui embarquent à bord d'un canot avec 18 hommes. Les autres doivent rester à bord pour aider à la manœuvre. Le capitaine Bligh réussit l'exploit d'emmener ce canot de 23 pieds surpeuplé jusqu'à Timor, soit un périple de 3,600 milles marins en 41 jours, avec quelques escales dans les îles inhospitalières du Pacifique.
Les mutins quant à eux, se dirigent vers l'île de Tubuai où ils essaient de s'y installer. Trois mois plus tard, ils retournent à Tahiti pour y déposer 16 membres d'équipage, dont l'officier Peter Heywood. Fletcher Christian, huit hommes d'équipage, six Tahitiens et onze femmes, dont une avec un bébé, s'embarquent à bord du Bounty en espérant d’échapper à la Royal Navy. Ils débarquent sur l'île Pitcairn, choisie car elle est mal positionnée sur les cartes maritimes de l'époque et incendie le navire le 23 janvier 1790. Cette date du 23 janvier est célébrée chaque année dans l'île Pitcairn. Les mutins finissent par massacrer les Tahitiens mâles puis, l'un d'eux ayant fabriqué un alambic de fortune, se mettent à l'alcool et commencent à s'entretuer. Le sort des mutins, recherchés par la Royal Navy, reste inconnu jusqu'à ce qu'un baleinier, le Topaz, s’arrête sur l'île pour prendre de l'eau en septembre 1808. Un seul mutin, John Adams, est encore en vie. Il vit avec dix femmes et leurs enfants.
Les mutins restés à Tahiti offrent quant à eux, leurs services de mercenaires et fournissent des armes au clan du chef Tu, participant ainsi à la création de la dynastie Pomare. En 1791, 14 des présumés mutins sont capturés par l’équipage du HMS Pandora ordonné par l’Amirauté d’aller les chercher. Revenant par l'ouest et le détroit de Torrès, la frégate s'échoua le 29 août 1791 sur la Grande Barrière de Corail. Elle coula le lendemain matin, coûtant la vie à 31 membres d'équipage et 4 des prisonniers enfermés et enchaînés. Le reste des 89 membres d'équipage et 10 prisonniers, dont 7 d'entre eux étaient hors de leur cellule lorsque le navire fit naufrage, débarquèrent sur un petit banc de sable. Après deux nuits sur l'îlot sablonneux, ils partirent à la rame vers le Timor dans 4 canots. Ils arrivèrent à Kupang le 16 septembre 1791 après une pénible traversée de la mer d'Arafura. Seize marins survivant du naufrage sont morts durant l’odyssée et de nombreux tombèrent malades au cours de leur séjour à Batavia, Jakarta. Finalement, seulement 78 des 134 hommes qui étaient embarqués à Portsmouth rentrèrent chez eux. Les survivants du naufrage et du périple en mer devront encore survivre au retour qui se fait dans des conditions lamentables.
Le procès en Grande-Bretagne est retentissant. Bligh rentré le premier, a déjà publié sa version des faits. Bien que sa sévérité soit connue dans la Navy et jugée tyrannique, l'opinion publique lui était largement favorable. Les témoignages s'accumulent, plus ou moins confus en ce qui concerne le rôle précis de chacun lors de la mutinerie. Certains échappent à la potence grâce à la clémence du roi.
Deux répliques du Bounty ont été construites pour les besoins du cinéma. La première réplique lancée en 1960 en Nouvelle-Écosse au Canada, pour le tournage du film Les Révoltés du Bounty avec Marlon Brando, a été redimensionnée pour laisser circuler les caméras librement sous les barrots de pont. Le scénario du film destinait la réplique du Bounty à être brulée à la fin du film mais Brando, l’enfant terrible du cinéma, s’y opposa fermement en menaçant de quitter le plateau de tournage, alors que le film était en voie d’être terminé. La MGM Studios n’a eu d’autres choix que de rebâtir une maquette-décors pour les besoins de cette mise à feu de manière à conserver le Bounty.
Le navire a par la suite fait de nombreuses apparitions promotionnelles, joué dans d’autres films dont Le Secret du Coffre Maudit, des séries télévisées et documentaires historiques. En 1965, le navire arriva à St. Petersburg en Floride, où il y demeura pendant les 21 années suivantes à titre d’attraction touristique à quai. En 1978, une seconde réplique à coque d’acier recouverte de bois a été construite en Nouvelle-Zélande, pour le film Le Bounty avec Mel Gibson et Anthony Hopkins et est utilisée depuis à des fins de loisirs à Discovery Bay, Hong Kong. En 1986, Ted Turner acquerra le Bounty.
En 1989, le superpétrolier Exxon Valdez au commande de Joseph Hazelwood s’échoue sur Bligh Reef, un écueil nommé en l’honneur du commandant William Bligh du Bounty et déverse 200 millions de litres de pétrole brut dans les eaux cristallines du Prince William Sound.
En 1993, Turner Broadcasting abandonne le Bounty au profit de la ville de Fall River dans le Massachusetts où il pourri humilié dans un état de déprédation. En 2001, Robert Hansen de la HMS Bounty Organization fait l’acquisition du Bounty pour une somme symbolique. L’objectif est de le restaurer pour qu’il puisse naviguer en tant que navire de plaisance et d’offrir à titre non-lucratif des classes en mer. Le navire a de plus une vocation commerciale détenant un certificat émis par la USCG d’attraction touristique à quai seulement. Après plusieurs radoubs de chantier naval, d’apparitions dans des foires nautiques et une transatlantique, on fait la demande d’un certificat pour le transport lucratif de passagers à l’American Bureau of Shipping. Pour se conformer aux exigences règlementaires, on devra effectuer un chantier majeur qui sera évalué hors de la portée financière de l’Organisation du Bounty. La décision est alors prise de mettre en vente le 3 mâts barque, tout en poursuivant son programme.
À la suite d’un chantier d’un mois à Boothbay Harbor, Maine, visant principalement à déplacer les quartiers de l’équipage et des réservoirs à eau vers l’avant, à installer de nouvelles soutes à combustible, à construire un nouvel accès entre l’entrepont et celui exposé et en terminant ces travaux, par déplacer vers l’arrière du ballast de plomb pour obtenir une assiette positive. Ainsi, on a modifié le centre de gravité sans consulter, sans connaître les impacts sur la stabilité, sans autorisation et donc, sans amender le livret de stabilité émis par la USCG qui certifie l’état de navigabilité et ce, même après avoir été avisé de cette bévue par un architecte naval via Facebook. Finalement, on a profité de l’occasion pour calfater les joints et abouts à l’étoupe et de sceller le tout avec du DAP 33 Kitchen and Bath ou NP1 et remplacer quelques vergues. Au moment du naufrage, la quille, la carlingue, des barrots et des membrures des œuvres vices étaient des années de la construction en 1960.
Le 25 octobre 2012, le Bounty sous le commandement de Robin Walbridge avec un équipage total de 17 membres, appareille de New London Connecticut pour St. Petersburg en Floride. Au même moment, le cyclone tropical Sandy après avoir balayé les Bahamas fait son atterrage sur Cuba avant de bifurquer vers le nord. Des modèles météorologiques français prévoient que Sandy altérera sa course en direction de la côte nord-est des États-Unis. L’ouragan Sandy sera ultérieurement déclaré comme étant le deuxième cyclone le plus dévastateur ayant touché la côte nord-est des États-Unis et aura provoqué la mort de 285 personnes et des dommages estimés à plus de $71 milliards de dollars. Le Bounty navigue alors en direction du sud par l’est de manière à garder en retrait l’ouragan et d’analyser sa trajectoire future, qui est estimée d’atterrir entre l’état de New York et celui du New Jersey. Le matin du 27 octobre le commandant change le cap du sud par l’est pour un nouveau cap vers le sud-ouest, en croyant profiter des vents portant cyclonaux nord-est.
Les conditions océaniques se détériorent sous des vagues de plus de 30 pieds, soulevées par des vents de 90 nœuds à contre le perfide Gulf Stream, s'écoulant entre le Cap Hatteras et l’œil de l’ouragan. Le navire roule, tangue, plonge et les efforts délient sournoisement la frêle structure et l’eau de mer envahie la cale et court-circuite les équipements. Les pompes ne suffisent plus. L’équipage est exténué, blessé et malade de mer. Les équipements mécaniques et électriques tombent en panne en cascade. On rapporte la condition du Bounty à la USGC mais croyant que le navire demeurerait à flot même avec 10 pieds d’eau dans la cale et un envahissement de 2 pieds à l’heure, on n’espère pas un sauvetage immédiat.
Le 29 octobre à 0334, le Hercule Longue Portée CG-2004 du Centre de Commande de la USCG du Secteur Nord de la Caroline dépêché sur les lieux du naufrage déclare que les conditions météorologiques empêchent les hélicoptères H-60 de procéder au sauvetage et sous ses recommandations, avise que le commandant abandonnera le Bounty à 0800. À 0341, le Capitaine Walbridge transmet un e-mail à la SEC.NC CC disant;
“We have lost all dewatering abilities. Estimate 6 – 10 hours left. When lose all power we will lose email. There should be an EPRB going off. Water is taking on fast. We are in distress. Ship is fine we can’t dewater. Need pumps.”
À 0426 le lundi 29 octobre 2012, les surfaces libres de l’eau de mer envahissante anéantissent la stabilité, le navire se couche sur son flanc, l’étrave immergée, le sort du Bounty en est jeté. L’équipage se retrouve à la mer dans le chao avant même d’avoir évacué. À 0640, un hélicoptère de la USCG arrive sur les lieux et on débute les opérations de hissage de l’équipage naufragé.
Lors du naufrage, on déplorera la mort de Claudene M. Christian âgée de 42 ans qui se trouvait une descendante du maître-voilier Fletcher Christian, à qui on attribue d’avoir pris à la tête de la célèbre mutinerie. Quant à la disparition du Capitaine Walbridge, il aura probablement élu de sombrer avec son navire.
Les enquêteurs de la Garde Côtière des États-Unis constatent des évidences substantielles que l’organisation HMS Bounty, le capitaine et un maître, ont au travers leurs actions et inactions commis des actes de négligence, qui ont contribués aux facteurs et aux causes de la perte de vies humaines consécutive au naufrage.
La saga du Bounty n’est pas terminée puisque la famille de Claudene M. Christian poursuit en justice Robert Hansen, l’armateur propriétaire et CEO de la HMS Bounty Organization pour la somme de $90 millions de dollars.
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